Pour Ellyn, qui se faisait un point d’honneur de ne jamais mentir (même si, de toute façon, elle n’y était pas très douée), elle avait de la difficulté à comprendre comment quelqu’un puisse choisir volontairement une telle habitude. Le haussement des épaules de son interlocutrice passa presque inaperçu, mais il semblait renforcer l’idée que, pour Elvire, garder les choses pour elle-même était un droit acquis et exploité couramment.
Ellyn avait l’impression qu’Elvire Albaril lui faisait honneur d’une vérité que, normalement, elle ne partagerait pas si facilement. Même si elle n’y comprenait rien, elle reconnaissait que c’était quelque chose de personnel. Ou, si non personnel, au moins quelque chose que cette femme préférerait garder secret.
Ainsi, elle reprit sincèrement un sourire et remercia son interlocutrice :
- Merci de me répondre honnêtement.
Tandis qu’Elvire reprit un visage neutre et dévisagea clairement le couloir derrière Ellyn, celle-ci se tassa délibérément du chemin pour la laisser passer.
- Je te laisse; je suppose que tu aimerais partir.
Son sourire se fit un peu plus incertain et ses traits devenaient plus préoccupés. Elle avertit Elvire :
- Mais, avant de te laisser, j’aimerais te dire quelque chose : je ne sais pas si nous aurions à travailler ensemble un jour, mais si oui, j’aimerais que nous établissions quelques règles. Je suis habituée de travailler en équipe. Je doute que ce soit le cas pour toi – sans vouloir t’offenser.
Elle leva les mains en signe de respect et prit un ton pragmatique, mais son discours resta franc. De toute façon, cette future conversation potentielle serait autant pour établir ses propres limites que pour exiger certains détails des habiletés de cette Elvire. Même si cette chevalière devait pouvoir l’examiner et la juger en tant que guerrière d’un seul coup d’œil, Ellyn ne voulait prendre aucune chance. C’étaient ces « petites chances » qui menaient des missions en duos à l’échec. Elle conclu :
- Jusque là, n’hésite jamais à me dire si une question n’est pas de mes affaires.
Elle ne put s’empêcher de sourire à celle-là. Jusqu’ici, ne pas avouer si une question était délicate ou personnelle n’était pas le problème principal, entre elle et Elvire! Elle ajouta avec un léger rire:
- Enfin, si jamais tu hésites!